Dans les valises il y a la mer - 1
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Pierre ( 2006)
Je ne sais pas comment commencer. Peut être par ce poème, retrouvé dans un cahier. Mon héritage. Anne. Anne écrivait ces choses. Il y a une date, à côté. 1989. L’année de notre séparation. Nous sommes restés amis après, comme on dit. Il n’y avait pas d’enfants, nous n’étions pas obligés. Le poème, le voici :
Tu n’étais pas avec moi quand j’ai contourné le mur.
Tu l’aurais escaladé, toi.
Ou bien tu aurais
Tout cassé
Explosé
Moi
J’ai fait le tour. Un homme
Regardait un fragment avec amour
Je n’avais pas de sentiment juste à poser sur ces ruines
Alors j’ai contourné, simplement
Laissé loin derrière la fête
Marché dans des rues, au hasard
Puis repris l’avion, sans savoir
Ce qui m’avait entraînée ici.
Anne est morte il y a douze ans déjà. Un accident. Je ne savais pas pourquoi je pensais à elle, à nouveau, depuis quelque temps. Un de ces anniversaires que votre inconscient aime à fêter malgré vous. Je suis retourné chercher le cahier, que j’avais rangé en haut des étagères du salon après l’avoir lu, ce jour de 1994 où la mère d’Anne me l’avait apporté avec la nouvelle de la mort d’Anne, elle ne voulait pas que je l’apprenne autrement.
J’ai relu le poème. J’ai pensé à cette époque, au temps passé. Nelly m’a trouvé rêvassant sur le canapé. Elle m’a embrassé dans le cou sans poser de questions. Ensuite, elle a mis un morceau de Coltrane et m’a pris par le main pour qu’on danse. J’ai un peu reniflé sur son épaule. Le téléphone a sonné. Nina prévenait qu’elle serait en retard, elle était restée chez son amie. C’était soir de foot pour Jules, on était tous les deux. C’était bien. J’ai oublié Anne et ses poèmes
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